92) Esquisse d’un éphèbe nu.

Jeune homme allongé sur le ventre


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François, esquisses sur papier Arches gris, copyright Eric Itschert.


Dessiner d’après un modèle vivant fait partie pour moi des grands plaisirs de mon travail. C’est alors l’intuition pure qui guide crayons et pinceaux. Le volume du corps se dévoile dans son entièreté, à travers les trois dimensions. Une séance de pose peut se révéler très créative, comme je l’évoquerai dans la note 93) « garçon nu : feuille d’esquisses »


Quand je dessine d’après photo, les limites imposées par les deux dimensions et le statisme du cliché peuvent donner l’impression d’une prison. Ce n’est que dans la mesure où l’on parviendra à s’échapper de ce carcan que de nouvelles formes de créativité seront possibles. Hockney est pour moi un maître à penser dans ce domaine (j’en ai parlé en bas de page dans une note antérieure).


On peut par exemple jouer sur les déformations occasionnées par la lentille, ou au contraire briser l’unité du modèle en le photographiant par fragments et en reconstituant le tout selon un nouvel ordre échappant aux déformations dues à la perspective. Hockney ne s’est jamais caché qu’il a été inspiré par Picasso. Dans sa période du cubisme analytique, Picasso a brisé le miroir des deux dimensions pour ré-assembler aléatoirement les morceaux du miroir en un nouvel ensemble qui était censé donner une meilleure idée des trois dimensions. Mais le miroir restait brisé. Hockney, lui, rend une cohérence nouvelle et harmonieuse à un assemblage qui crée un miroir renouvellé. (1) 


Dans l’exemple montré ici les deux esquisses d’après photo sont un simple exercice. Cet exercice permet toutefois de déplacer certains accents, d’accentuer des détails (lumières et ombres par exemple), d’en atténuer d’autres, ou encore d’introduire de légères modifications (incidence de la lumière modifié dans le dessin du dessus par exemple). Il s’agit d’un travail tout en subtilité que l’ordinateur ne permet pas d’égaler. Les modifications numériques sur la photo même sont d’un autre ordre : elles garderont trop souvent un côté mécanique. J’en montrerai un exemple dans une note suivante. La photo ou un dessin initial permet en effet de réaliser plus facilement des séries sur ordinateur en démarrant d’une seule pose ou en mélangeant plusieurs poses différentes.


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Une photo de François sert de départ pour un des dessins ci-haut…

« François commence à s’assoupir. Je vais interrompre la pose pour le laisser dormir le temps d’une sieste improvisée. C’est mon appareil photo qui prend le relais du crayon et du papier, en particulier  lorsqu'il se réveillera. La rapidité d’exécution de la photo permettra de capturer le moindre de ses mouvements dans ce moment de fragilité particulière où la conscience n'est pas encore bien réveillée.  Après sa sieste il soupire de bien-être et baille. Les yeux toujours fermés il frotte langoureusement son bassin contre les draps comme s'il commençait à faire l'amour au lit, ses fesses s'arrondissent et se creusent plusieurs fois. Le mouvement est lent et régulier. Il prend appui sur ses coudes pour l'amplifier. L'ondulation ne dure pas longtemps et dure une éternité, le temps de quelques soupirs plus forts succédant au premier. Soudain le garçon interrompt ses mouvements, comme un oiseau somnambule arrêté en plein vol. Il n'atteindra pas son objectif, l'extase finale. Il ouvre les yeux et se retourne, semblant se rappeler où il est. Le résultat de la sieste est impressionnant. Je lui ai appris à ne pas en avoir honte, alors il s'étire de tout son long me dévoilant encore mieux son ventre. Ensuite son regard est un mélange d'interrogation, de défi et de fierté. Je lui réponds par un sourire. Il semble soulagé et sourit à son tour. Ce garçon est vraiment superbe...» 



(1) Rajoutons pour éviter tout malentendu que Picasso n’utilisait pas de photo et Hockney bien ! En visitant l’abbaye de Fontfroide dans le midi de la France, j’ai pu observer un vitrail reconstitué aléatoirement de fragments de vitraux détruits pendant une des guerres mondiales. Bizarrement j’ai de suite pensé aux miroirs brisés de Picasso. Picasso était un grand maître en dessin, pourtant une part de sa vie a été consacrée à l’introduction du chaos dans la perception que nous avons des choses. 



Commentaires

  1. tranquille et beau ...je fermerais bien aussi les yeux a le voir assoupi
    le réveil de ton modèle est ma foi assez érotique ;)
    bon WE Eric ☺

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