189) Une illustration-idéogramme
Archives, 30/06/2014
Mais qu’est-ce qu’un idéogramme, me demanderez-vous ? Je dois d’abord en passer par la définition d’un phonogramme, car nous sommes habitués à utiliser des phonogrammes et non des idéogrammes.
1) Qu’est-ce qu’un phonogramme ?
L’écriture utilisée par notre civilisation occidentale du XXIème siècle est basée sur des phonogrammes, c’est à dire que chaque signe, chaque lettre (de notre alphabet) représente un son ou la manière de prononcer ce dernier. Les sons ou lettres s’assemblent ensuite pour construire un mot. Cette manière de concevoir l’écriture influence radicalement notre mode de penser, porté vers le dualisme. Certes, notre tendance au dualisme nous a aidés à avancer technologiquement et à concevoir par exemple le monde numérique, basé sur des 0 et des 1, des non/oui, des soit/soit. Mais notre pensée spirituelle (que ce soit morale, religieuse ou philosophique), sans cesse empoisonnée par le manichéisme (blanc/noir, bon/mauvais, gentil/méchant), en a aussi été profondément altérée.
2) Qu’est-ce qu’un idéogramme ou logogramme ?
Idéogrammes, logogrammes. Chine. |
D’autres civilisations comme la chinoise ont des écritures basées sur des idéogrammes, encore appelés logogrammes. Dans le Petit Robert de la langue française on définit le mot idéogramme ainsi : « de idéo- et –gramme : signe graphique minimal qui, dans certaines formes d’écriture, constitue un morphème, un mot ou une notion (opposé à phonogramme). Voir logogramme. »
Ben zut alors ! Qu’est-ce donc qu’un morphème ? « 1. Elément grammatical d’un mot. 2. La plus petite unité significative. » On n’est pas sorti de l’auberge, je vais essayer d’expliquer autrement sans trop simplifier : un idéogramme peut représenter un mot entier, une notion, un symbole, les trois à la fois. Donnons un premier exemple : notre mot « arbre » s’écrit en chinois en un seul caractère :
木 (mù)
C’est un pictogramme qui représente la racine arbre ou bois. (Un pictogramme est un idéogramme qui représente directement, en le dessinant, un élément concret de la réalité.)
Les hiéroglyphes de l’Egypte antique contiennent aussi des idéogrammes (pour exemple voir la notion de dieu, neter). La pensée des pays d’Extrême-Orient ou de l’Egypte antique en a bénéficié et ne présente pas ce dualisme propre à notre Occident contemporain (le dualisme est introduit en Egypte seulement sous l’influence des Ptolémée grecs). Nous avons tout intérêt à revisiter nos pensées à l’aune de ces précieux apports ! Personnellement j’ai découvert avec ravissement le monde des hiéroglyphes, qui permet de concevoir des notions, au départ inexprimables, par des paradoxes. Le Christ, vivant dans un monde utilisant des phonogrammes, est obligé de procéder autrement. Il utilise des paraboles.
3) Le concept d’illustration-idéogramme.
Revenons un instant aux hiéroglyphes. Certains hiéroglyphes sont en même temps des illustrations et des idéogrammes. Prenons un exemple : « bnw », représenté ci-contre par un héron cendré : c’est un dessin qui est « illustration » d’un héron cendré. Mais il est aussi idéogramme pour « phénix », ou encore « l’héritier des jours », ou encore, surmonté de deux plumes, « l’âme de Rê ».
Lorsque nous voyons des illustrations, nous pouvons nous perdre dans de merveilleux détails. L’illustration par définition « illustre », « orne » un texte. Mais on peut aussi décider un jour d’exprimer des notions simples, presque abstraites à force de devenir générales : je voudrais représenter le concept de voilier et non un voilier en particulier, le concept de baigneur et non un baigneur en particulier, le concept la mer et la vague et non une mer et une vague particulière. Le texte s’appuyant sur une « illustration-idéogramme » peut alors très bien se passer de certaines parties devenues inutiles.
4) Une illustration réalisée grâce à Photoshop.
Grâce à Photoshop on peut réaliser une série d’illustrations-idéogrammes pour peu qu’on ait une bonne réserve de photos originales de son propre cru (évitant ainsi les problèmes de copyright). La méthode permet une grande unité entre les illustrations.
L’illustration-idéogramme montrée en tête est la première d’une série que j’ai réalisée en une seule journée. Il s’agit de trouver une « recette » suffisamment subtile afin que l’illustration parvienne à cet état d’idéogramme. Cette série est traitée de manière minimaliste, où paysage, éléments et personnages sont réduits à la plus simple expression tout en gardant un certain charme. La mise au point de la recette prend le gros du temps de travail : même en utilisant Photoshop Elements 9 il y a des milliers de paramètres possibles, et c’est au créateur de trouver la bonne alchimie...
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