350) Paysage rêvé

 

Au bord de l'eau (titre au dos de l'esquisse), aquarelle sur papier 
300gr/cm2, © Eric Itschert

Un paysage désert

En retrouvant cette aquarelle dans une farde je me suis dit qu'elle avait un aspect étrange et mystérieux. Elle méritait d'être publiée ici. Deux jeunes hommes se baignent dans un paysage désert. Il n'y a aucune autre présence que la leur, pas un seul oiseau, pas un seul animal. Les rochers en face sont trop nets et trop parfaits. Un garçon est entré nu dans l'eau, l'autre semble se pencher pour observer quelque-chose que nous ne voyons pas. Il profite de la chaleur de la pierre sur laquelle il est assis. Le soleil semble être déjà assez bas sur l'horizon, mais on ne le voit pas non plus.

L'univers de Giorgio De Chirico

Giorgio De Chirico a influencé beaucoup de peintres. La magie de ses peintures opère aussi sur moi. Cette aquarelle, par sa solitude intemporelle et hallucinatoire, ouvre un champ métaphysique, celui propre à certains de mes rêves. Point de mannequins ou de statues antiques pour illustrer ce paysage presque vide. Seulement une série de plans successifs débouchant sur l'infini à gauche, un infini voilé par des branchages. Cette aquarelle se voulait au départ illustration, et concernant mon travail d'illustrateur mes maîtres étaient multiples, j'ai appris sur le tas.

Paysage rêvé.

Cette aquarelle a une histoire particulière. Nous connaissons tous des récits où le protagoniste entre dans un tableau ou un livre. Il accède à un nouvel univers, où sa vie se réinvente.

Le soir où j'avais presque achevé cette aquarelle je me suis endormi tôt. La nuit je me suis retrouvé vivant dans la scène peinte. C'était un rêve incroyable de réalité, un de ces rêves où l'on se croit éveillé. En même temps je vivais dans un monde bien plus parfait que le nôtre, plus coloré, plus lumineux, plus harmonieux. C'était une perfection presque minérale. C'était un rêve qui marque, qu'on n'oublie pas de sitôt. Le lendemain matin je voulais reprendre mon travail. Je voulais rajouter un voilier et des oiseaux, et puis des arbres au pied des rochers. Mais si je rajoutais cela, je trahissais mon rêve. Alors je n'ai plus touché à cette peinture. Je l'ai rangée telle quelle...